Centre de recherches juridiques
de l’Université de Franche-Comté

La corvée des routes au XIXe siècle : une institution méconnue, la prestation en nature

in Mémoires de la Société pour l’Histoire du Droit et des institutions des anciens pays bourguignons, comtois et romands (MSHDB), tome 68

Le maillage du territoire par un réseau routier de bonne qualité constitue un enjeu stratégique pour un État : par les routes circulent les hommes, les marchandises et les armées. En 1776, Turgot supprimait la corvée royale des routes, remplacée par un impôt universel. La réforme échoua. La corvée fut rétablie. Mais le problème était posé : quel pourrait être l’impôt égalitaire pour financer les routes ? Après la tourmente révolutionnaire, les édiles constatent le mauvais état des routes, notamment des chemins ruraux. Les voies nationales sont sous la responsabilité de l’État. Le réseau local d’intérêt départemental ou communal dépend des autorités de proximité. L’Empire puis la Restauration réintroduisent la corvée des chemins vicinaux ou prestation en nature, contribution de travail convertible en argent. La Monarchie de Juillet perfectionne l’impôt, par la loi du 21 mai 1836, véritable code de la vicinalité, stimulant ainsi le renouveau du réseau vicinal et de l’économie rurale. L’examen de ses modalités de fonctionnement, de son assiette, de l’organisation de la journée est révélateur des pratiques et des mentalités de la France rurale. La prestation en nature finit par être adoptée par les paysans. L’administration restera prudente, soucieuse d’effacer le souvenir du travail forcé et des corvées de la féodalité. À la fin du siècle, la suppression de la « prestation en nature-corvée des routes » est mise en œuvre par les républicains.

janvier 2012
p. 101-136